Carte blanche : L'emploi objectif prioritaire

 

David de la Croix

 

 

Force est de constater que la promotion de l'emploi ne figure pas parmi les objectifs prioritaires de la politique économique. La stratégie contre le chômage manque clairement d'ampleur et les mesures prises dans le cadre du plan global et du plan pluriannuel pour l'emploi apparaissent encore bien timides.

 

Parallèlement à cette absence de priorité effective, on observe que les acteurs politiques et sociaux sont unanimes pour déclarer que l'objectif de plein-emploi est prioritaire. Deux arguments de poids sont généralement invoqués: d'une part, l'évidente ampleur de la demande d'emploi insatisfaite. D'autre part, la perception que la résorption du chômage constitue un moyen des plus efficace pour lutter contre la fragmentation sociale.

 

Face à cette contradiction entre discours et pratique, une question: comment expliquer la faible ampleur des mesures prises pour lutter contre le chômage ? L'objectif de plein-emploi est il techniquement inatteignable ou bien politiquement irréaliste ?

 

Nous ne pensons pas que la réduction du chômage soit techniquement inatteignable mais bien que l'absence de priorité politique se fonde sur une carence de majorité soutenant les différents projets de lutte contre le chômage. Nous tenons en effet à souligner avec vigueur que toute politique sérieuse de réduction du chômage requiert une redistribution de ressources importante au sein de la population.

 

Deux exemples: une réduction substantielle des cotisations sociales devrait améliorer sensiblement la situation du marché du travail. Le financement de cette réduction nécessite une augmentation des taxes indirectes, accises et autres. L'opération consiste donc bien en un transfert de ressource massif des consommateurs vers les chômeurs. La réduction du temps de travail, quant à elle, revient à transférer des ressources des entreprises et des travailleurs qui perdraient éventuellement une part de leur salaire vers les chômeurs. Il apparaît donc difficile de dégager une majorité en faveur de telles politiques.

 

Ce mécanisme de blocage est d'autant plus dommageable que les conséquences à long terme d'un chômage élevé sont souvent sous-estimées. Outre les aspects liés à l'équité, la précarisation d'une tranche entière de la nouvelle génération ne peut qu'induire une perte de capital humain pour la société et ainsi handicaper les potentialités de croissance à long terme. Il est donc très important, dans les arbitrages actuels, de donner beaucoup de poids à cet élément et de réaliser que la société dans son ensemble gagne à résorber le chômage, même si les politiques à mettre en oeuvre nécessitent des transferts de ressources significatifs.

 

Finalement, nous tenons aussi à souligner qu'une véritable politique de l'emploi ne peut à elle seule combler les aspirations des générations futures et que la mise sur pied d'une politique plus large visant à promouvoir des modes alternatifs de participation sociale est

souhaitable.