ELEC 2311 : Physique interne des convertisseurs électromécaniques
Semaine 4 : Caractérisation des matériaux
Guidance

Milieux magnétiques avec hystérésis

A la page précédente, nous avons supposé que la relation entre B et H était univoque. En fait, cette hypothèse n'est que très grossièrement vérifiée par les matériaux magnétiques. Elle est cependant intéressante car elle permet de tenir compte des aspects les plus importants du comportement magnétique des matériaux tout en restant relativement simple du point de vue du calcul des champs.

Une hypothèse moins sévére consiste à supposer que la relation entre B et H est instantanée (indépendante de la vitesse à laquelle les champs varient), mais sans lui imposer d'être univoque. L'état magnétique d'un matériau dépend alors des valeurs prises par les champs dans le passé. Ce phénomène s'appelle l'hystérèse.

Forme des relations constitutives

Un milieu magnétique avec hystérèse est caractérisé par une relation B-H non univoque. La figure ci-dessous fournit une allure typique de cette relation.

Figure S04-21

On n’oubliera pas que B et H sont des vecteurs, de sorte que la figure S04-21 ne décrit que le cas particulier où ces vecteurs sont alignés (milieu isotrope).

Tous les points du plan ne sont pas accessibles. Il existe un cycle limite à l’intérieur duquel se trouvent tous les points accessibles.

Pour des champs de grande valeur, on tend toujours vers une asymptote de pente µo .

Grandeurs remarquables

Les matériaux magnétiques sont classés en fonction de la dimension et de la forme du cycle limite.

Il n’y a pas véritablement de valeur précise pour le champ de saturation. Par contre, si on définit la polarisation magnétique J par

(S04-85) J = B - µo H

où le symbole J n’a rien à voir avec la densité de courant, cette polarisation tend asymptotiquement vers une valeur Js qui est une caractéristique importante du milieu.

La figure S04-21 indique que Js correspond à l’ordonnée à l’origine de l’asymptote.

Au lieu de Js, on peut utiliser la magnétisation à saturation, définie par

(S04-86) Ms = Jso = B/µo - H

On définit aussi le champ rémanent Br comme la valeur du champ (sur le cycle limite) correspondant à H = 0.

Le rapport entre Br et Js dépend de la nature du matériau. Pour un matériau polycristallin isotrope (grains orientés au hasard), le rapport entre Br et Js ne dépend en principe que du type de cristal.

Pour des cristaux uniaxes (terre-rares), on a Br / Js = 0.5 .

Pour des cristaux cubiques avec 3 directions d’aimantation facile (fer), on a Br / Js = 0.832 .

Pour les autres cristaux cubiques (nickel et la plupart des ferrites), on a Br / Js = 0.866 .

Réf. : D.J. Craik, Structure and Properties of Magnetic Materials, 1971, Pion Limited.

En pratique, cependant, les matériaux isotropes n’atteignent que des rapports Br / Js de l’ordre de 0.6 à 0.7 pour les cristaux cubiques.

En rendant le matériaux anisotrope, on peut augmenter fortement le rapport Br / Js dans une direction (en le diminuant dans les autres !). Ceci est particulièrement important pour les aimants terre-rares.

La largeur du cycle limite est caractérisée par le champ coercitif Hc .

Enfin, la forme du cycle peut être précisée par la donnée par la valeur maximum du produit

(S04-87) -HB

que l’on appelle (à tort) énergie, ou, mieux, par la donnée du point pour lequel ce produit est maximum.

Pour un point de la caractéristique magnétique, on définit la perméabilité magnétique différentielle comme le rapport entre DB et DH lors de petites variations. Puisque B et H sont des vecteurs, cette perméabilité est un tenseur. Elle peut être anisotrope même si le matériau n'a pas de directions préférentielles.

 

Modélisation complète de l'hystérésis.

Modéliser correctement l'hystérésis est difficile car il existe dans le graphe de la figure S04-21 une infinit´ de courbes possibles en fonction des valeurs passées des champs.

Lorsque l'hystérésis est modélisé en vue du calcul des champs, il l'est le plus souvent par une variante du modèle de Preisach.

Référence : F. Preisach, "Uber die magnetische Nachwirkung ", Z. Phys., vol. 94, pp. 227-302, 1935.

Ce modèle repose sur une idée physique qui s'est avérée fausse, mais il permet néanmoins une bonne représentation des caractéristiques réelles.

Référence : N. Janssens, Hystérésis magnétique et ferrorésonance. Modèles mathématiques et application aux réseaux de puissance. Thèse UCL, 1981.

Modélisation des pertes par hystérésis

Les pertes par hystérésis sont rigoureusement proportionnelles à la fréquence puisque la surface encerclée lors d'un cycle est indépendante de la surface de celle-ci. On utilise souvent l'expression.

(S04-88) densité de pertes par hystérésis = A f Bch

où l'exposant empirique h porte le nom de coefficient de Steinmetz.

Cette expression ne décrit pas toutes les pertes magnétiques du milieu.

Certaines pertes, qui échappent aux hypothèses de ce chapitre, dépendent de la vitesse de variation des champs. Il s’agit surtout de pertes par courants de Foucault. Il faut distinguer de ce point de vue les pertes par courants de Foucault macroscopique, qui sont liées à la densité de courant macroscopique J des pertes par courant de Foucault microscopiques, qui sont associées à des courants à petite échelle (dimension des grains dans les ferrites, épaisseur des tôles dans les noyaux feuilletés). Ce dernier type de pertes peut exister même si le matériau est isolant à grande échelle. En ajoutant à (2.33) un terme de pertes qui a été introduit dans le contexte des matériaux linéaires, soit (2.24), on obtient l'expression.

(S04-89) Densité de pertes magnétiques = A f Bch + B f2 Bc2

On remarque que cette expression contient exactement autant de coefficients à déterminer empiriquement que (S04-25).

Exercice proposé S05-12 : évolution des pertes à tension fixée

Occurrence des caractéristiques univoques

Les matériaux qui présentent des propriétés magnétiques (ou électriques) très différentes de celles du vide sont toujours à la fois non linéaires et sujets au phénomène d'hystérésis. Cependant, comme la prise en compte complète de l'hystérésis dans les calculs de champ est numériquement très lourde, on est amené à remplacer pour le calcul les caractéristiques avec hystérésis par des caractéristiques univoques, comme nous l'avons fait aux pages précédentes.

Pour un matériau donné, ce remplacement peut s’effectuer de plusieurs façons, compte tenu du mode d’utilisation de ce matériau. A titre d’exemple, citons la courbe de première aimantation, le lieu des extrémités des cycles symétriques ou encore la courbe de désaimantation (partie supérieure du cycle limite).

On restera donc critique vis à vis des caractéristiques " prêtes à l’emploi " incluses dans les logiciels.

Lors de la caractérisation des matériaux, les grandeurs telles que Br, Hc.... sont définies sur une courbe qui est la partie supérieure du cycle limite. Lorsque l'on considère une autre courbe, ces grandeurs peuvent encore être définies, mais ce sont alors seulement des caractéristiques du modèle, pas des caractéristiques des matériaux.

Dans le cas des matériaux durs, on utilise couramment deux courbes différentes. Pour l'étude de la mise en service du dispositif, c'est la courbe de désaimantation qu'il convient d'utiliser. Cependant, une fois le point de fonctionnement atteint, les petites variations de champ vont faire parcourir au matériau un cycle secondaire. Ce cycle est souvent assimilé à une droite (la droite de recul). On notera que la pente de cette droite est inférieure à la pente de la caractéristique de démagnétisation.

Figure S04-22 : deux caractéristiques univoques utilisées pour le même matériau (aimant permanent)

Il arrive même qu'un matériau soit modélisés tantôt par un modèle de matériau doux, tantôt par un modèle de matdériau dur. C'est le cas de certains alliages de fer et de nickel qui sont intéressant comme matériau doux à cause de leur champ de saturation élevé, bien qu'ils aient aussi un champ coercitif assez élevé et donc des pertes par hystérésis importantes. Par contre, dans d'autres applications, ils sont intéressant comme matériau dur justement pour la valeur de leur champ coercitif.

Placés au rotor d'une machine synchrone, ces matériaux se comportent comme des matériaux doux pendant la phase de démarrage (en asynchrone), puis comme des aimants permanents grâce à la magnétisation qu'ils ont acquise pendant le démarrage.

Page précédente

Suite de la guidance

Retour au menu de la semaine 4

Retour à la page d'accueil

Besoin d'une aide personnalisée ?

Dernière mise à jour le 05-10-2003