ELEC 2311 : Physique interne des convertisseurs électromécaniques
Semaine 4 : Caractérisation des matériaux
Guidance

La saturation magnétique

Relations constitutives univoques

Une autre façon de simplifier les relations constitutives générales consiste à caractériser ces milieux par une fonction indépendante de la fréquence (mais en général non linéaire). Il s'agit donc d'une démarche très différente de celle faites aux deux pages précédentes. Pour l'instant, nous supposerons que la fonction qui relie B et H est univoque. On a donc

(S04-65) B = B(H) ou H = H(B)

En réalité, H et B sont des vecteurs (covecteur d’une part, densité vectorielle de l’autre), de sorte que les fonctions (S04-65) sont en fait des ensembles de trois fonctions à trois variables. Ce n'est que dans le cas particulier d'un milieu isotrope et en référentiel orthonormé que les fonctions (S04-65) peuvent se réduire à une fonction à une variable.

On peut définir de la même façon un milieu électrique univoque par

(S04-66) D = D(E) ou E = E(D)

Distinction entre milieux doux et durs

On distingue les milieux doux (caractéristique magnétique passant par l’origine) et les milieux durs (caractéristique ne passant pas par l’origine).

a) milieu doux b) milieu dur

Figure S04-13 : caractéristique magnétique de milieux doux et dur

Les milieux durs sont parfois modélisés comme étant formés d'un matériau doux auquel on superpose une magnétisation constante, soit

(S04-67) B = f (H + M )

f est une fonction univoque qui s'annule quand son argument est nul.

Exercice proposé S04-11 : modélisation des aimants utilisant une polarisation magnétique constante.

Résistivité, permittivité et perméabilité

On peut définir les notions de résistivité, permittivité et perméabilité dans le cas de milieux non linéaires, mais ces paramètres dépendent du point de la caractéristique considéré. En outre, il existe plusieurs façons de les définir.

La définition que nous préférons est différentielle. On a par exemple

(S04-68) µ = dB / dH

La définition (S04-68) s’étend sans difficulté au cas où l’on considère B et H comme vectoriels. µ est alors un tenseur à deux indices.

(S04-69) µij = Bi / Hj

Si le milieu est isotrope et linéaire, les composantes du tenseur (2.39) forment, en référentiel orthonormé, une matrice scalaire. Il n'en est pas de même dans le cas d'un milieu isotrope mais non linéaire, car la présence d'un champ non nul "brise" alors l'isotropie du milieu.

Une autre définition très employée est

(S04-70) = B / H

pour la perméabilité (totale), et

(S04-71) = H / B

pour son inverse, la réluctivité (totale).

Une façon fréquente de mettre en mémoire la caractéristique magnétique consiste à mettre en mémoire des valeurs de en fonction de B2 .

Les définitions (S04-70) et (S04-71) n'ont de sens que pour un matériau isotrope, car lorsque les vecteurs H et B ne sont pas alignés, faire leur rapport n'a pas de sens. Dans le cas de matériaux isotropes et linéaires, les définitions (2.45) et (2.48) coïncident.

Dans le cas de matériaux dur, les définitions (2.48) et (2.49) ne peuvent pas être appliquées telles quelles car elles conduiraient à des valeurs de µ et n qui deviendraient négatives et varieraient de 0 à ¥ dans la zone normale d'utilisation de ces matériaux !

Pour utiliser et même dans le cas de matériaux durs, on est donc amené à les définir non pas sur la caractéristique " réelle ", mais sur une caractéristique modifiée obtenue par translation (voir formule 2.37 ou exercice 2.8), et on doit supposer que le matériau doux ainsi défini est isotrope.

Caractérisation des milieux doux

Pour les milieux doux non linéaires, Jsat et la valeur de µ en un point situé " un peu en dessous de la saturation " sont des caractéristiques intéressantes. Citons aussi la perméabilité initiale µi et la valeur maximale de µ .

.............Mettre ici une figure 14....................

Caractérisation des milieux durs

Pour les matériaux durs, Jsat a moins d'intérêt pratique. On définit

Parfois, on considère deux notions différentes pour le champ coercitif, à savoir

Ces notions sont illustrées à la figure ci-dessous.

Figure S04-17 : caractéristique univoque d'un matériau dur

La caractéristique magnétique B-H des matériaux durs peut parfois porter le nom de courbe de démagnétisation, comme nous l'expliquerons plus loin.

Cas particulier des aimants à caractéristique droite

Pour certains aimants, la caractéristique B-H est une droite pour une large plage de valeurs des champs. Il s'agit là d'un cas particulier qu'il faut se garder d'appliquer à tous les aimants indistinctement. En fait, ce n'est que pour les aimants terres-rares (voir description ci-dessous) que l'on peut considérer la caractéristique B-H comme droite pour une large plage de valeurs des champs, couvrant même souvent tout le deuxième quadrant de la caractéristique, depuis le point B = Br jusqu'au point H = Hc ou en tout cas un point proche de H = Hc (voir figure 19).

Fig. S04-19

Dans le cas de ces aimants, la perméabilité magnétique est à peine supérieure à celle du vide. Ainsi, on a

mr = 1.05 pour les SmCo

Exercice .... : montrer que, si on considère que mr = 1 , on peut considérer que la magnétisation et la polarisation magnétique sont constantes.

Exercice .... : si on considère que mr est constant mais légèrement supérieur à 1 , comment la magnétisation et la polarisation magnétique dépendent-elles de la valeur du champ H (utilisez Br et mr)(si le point H = Hc fait partie du tronçon droit, on pourrait aussi utiliser Hc et mr comme paramètres).

Dans le cas d'aimants à caractéristique linéaire, on peut calculer facilement Br et Hc en fonction du produit B-Hmax. Une propriété intéressante est que le point à produit B-H maximum se trouve exactement au milieu du segment de droite formé par la caractéristique magnétique dans le deuxième quadrant.

Exercice .... : démontrez la propriété ci-dessus.

Exercice .... : calculez les caractéristiques Br et Hc des aimants N-35 , sachant que pour ces aimants B-Hmax = 35 mégagauss*oersted et en admettant que mr = 1.05 . Quelle est l'erreur commise si on fait le calcul avec mr = 1.

Comparaison entre matériaux durs

La qualité des matériaux durs s'est beaucoup améliorée tout au long du 20ième siècle

Le tableau de la figure ci-dessous comporte à la fois des caractéristiques d'aciers (au chrome, au tungstène, au cobalt... utilisés dans les années 1950 pour réaliser les aimants permanents (aciers durs), et des caractéristiques de matériaux industrialisés plus tard jusqu'au FeNdB qui date de la fin du 20ième siècle.

Les aimants terres-rares comprennent deux familles, les samarium-cobalt (Sm Co) et les fer-néodyme-bore (FeNdB). Malgré des performances magnétiques un peu inférieures aux FeNdB, les Sm Co sont normalement préférables techniquement à cause de leur température de Curie plus élevée. Ils sont malheureusement plus coûteux à cause de la présence de cobalt dans leur composition.

Ajoutons que les matériaux terres-rares récents sont actuellement protégés par des brevets, alors que le brevet Philips relatif aux ferrites est tombé dans le domaine public.

Les aimants terres-rares sont caractérisés par un champ coercitif important. La perméabilité magnétique différentielle est pratiquement égale à celle du vide, soit typiquement mr = 1.05 .

Désignation
succinte

Rémanence
Br en mT

Coercitivité
en kA m-1

(BH)max
kJ/m3

Remarques

Aciers

au chrome

970

5.2

2.1

au tungstène

1000

6.4

2.7

au cobalt

950

20.4

8.1

Alliages AlNiCo

Anisotropie de forme en particules allongées

37/5

1180

HcJ=49

37

coulé (8Al, 24 Co, 3 Cu, 14 Ni, bal. Fe)

34/5

1120

HcJ=48

34

fritté (8Al, 24 Co, 3 Cu, 14 Ni, bal. Fe)

52/6

1250

HcJ=56

52

coulé et colonnaire (8Al, 24 Co, 3 Cu, 14 Ni, bal. Fe)

38/11

800

HcJ=112

38

coulé (7 Al, 35 Co, 3 Cu, 14 Ni, 5 Ti, bal. Fe)

31/11

760

HcJ=111

31

fritté (7 Al, 35 Co, 3 Cu, 14 Ni, 5 Ti, bal. Fe)

60/11

900

HcJ=112

60

coulé et colonnaire (7 Al, 35 Co, 3 Cu, 14 Ni, 5 Ti, bal. Fe)

Ferrites durs

Anisotropie magnétocristalline

26/18

370

HcJ=180

26

fritté, haute rémanence

20/28

310

HcJ=280

20

fritté, haute coercitivité

10/22p

230

HcJ=225

10

avec un liant

ESD FeCo 27/8

730

HcJ=77

27

Particules mono domaines allongées et avec un liant

Cr Fe Co 37/5

1200

HcJ=47

37

Alliage coulé 25 Cr, 15 Co; bal. Fe (anisotropie de forme)

Mn Al C 48/20

550

HcJ=200

48

Alliage extrudé à chaud, 69.5 Mn, 29.8 Al, 0.7 C (anisotropie magnéto-cristalline

Alliages terres rares-cobalt ReCo

Anisotropie magnéto-cristalline

120/96

770

HcJ=960

120

famille SmCo5 fritté (nucléation)

230/45

1000

HcJ=450

230

famille Sm2 (Co, Cu, Fe, X)17 (accrochage)

48/60p

500

HcJ=600

48

famille SmCo5 avec un liant

Alliages terres rares FeNdB
(Fer-Néodyme-Bore)

1170

870

255

température de Curie très faible

1250

938

294

température de Curie très faible

Fig. S04-18 : propriétés de différents types d'aimant permanent

La figure suivante, extraite d'une documentation technique de la firme VAC (vacuumschmelze gmbh), compare les caractéristiques à température ambiante de différents matériaux durs.

Fig. S04-20 : Courbes de démagnétisation typiques

L'utilisation des ferrites, et plus encore celle des aimants terres-rares, a permis l'apparition de nouvelles formes de machines.

Lien intéressant : on peut trouver des caractéristiques de matériaux magnétiques durs à la fin du catalogue Sopimed (grossiste belge) consacré aux aimants permanents, ainsi que sur les sites de Earthbound Magnetics, American Union Group ou Rheinmagnet

Lien avec relations globales

Les différents types de relation que l'on peut rencontrer entre B et H trouvent bien entendu des équivalents globaux sous la forme de relations du même type entre le flux y et le courant i .

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Dernière mise à jour le 05-10-2003