FSAC 1430 Physique T4 : électricité et magnétisme
Semaine 3 : Courant et modèles locaux de conduction
Guidance

Densité de courant

Notion de courant "de charge"

Durant les semaines 1 et 2, nous n'avons considéré que des situations où les charges électriques étaient immobiles, ou du moins où le temps pris par leur déplacement n'intervenait pas. Nous considérons maintenant le cas où on doit considérer le déplacement des charges en tenant compte du temps correspondant.

On peut définir le courant "de charges" ic qui traverse une surface quelconque S comme la limite du rapport entre la quantité de charge Dq qui a traversé cette surface et la durée Dt considérée (limite prise pour Dt tendant vers 0).

(S03-0) ic = lim (Dq / Dt) lorsque Dt tend vers 0

Un cas particulier de l'équation (S03-0) est celui où la surface S est une surface fermée. En ce cas, le courant ic traversant cette surface de l'intérieur vers l'extérieur n'est autre que

(S03-0b) ic = - dq / dt

où q est la charge encerclée par cette surface. Dans cette formule, le signe - vient de ce que la charge contenue dans un volume diminue lorsqu'un courant "de charge" s'en échappe.

Notion de densité de courant

Le rythme de déplacement des charges électriques dans l'espace peut être caractérisée par la donnée en tout point d'un grandeur nommée la "densité de courant".

En effet, considérant une surface élémentaire (c'est-à-dire assez petite pour que la densité de courant soit uniforme sur cette surface) d'aire DS et le courant "de charge" Dic qui traverse cette surface à l'instant considéré, on définit la composante Jn de la densité de courant dans la direction normale à cette surface comme la limite du rapport entre Dic et DS

(S03-0c) Jn = lim (Dic / DS) lorsque DS tend vers 0 .

En un point donné, on peut ainsi définir la composante de la densité de courant dans n'importe quelle direction. On peut montrer qu'il existe un vecteur tel que toutes ces composantes sont égales au produit scalaire de ce vecteur avec le vecteur normal à la surface. Par la suite, c'est ce vecteur que nous appellerons " la densité de courant " .

Les deux passages à la limite considérés successivement ci-dessus auraient pu être effectués en une seule étape.

Considérant une surface élémentaire (c'est-à-dire assez petite pour que le vecteur soit uniforme sur cette surface) d'aire DS, un intervalle de temps élémentaire (c'est-à-dire assez petit pour que le vecteur soit constant sur cet intervalle) de valeur Dt . Soit Dq la quantité de charge électrique qui traverse la surface élémentaire pendant l'intervalle de temps considéré, on définit la composante de normale à cette surface comme la limite

(S03-0d) lorsque Dt et DS tendent vers 0 .

En procédant de la sorte, nous aurions évité d'introduire la quantité ic , ce qui aurait été dommage car cette quantité est le correspondant global de la densité de courant . On peut en effet étendre (S03-0b) à une surface quelconque (non infinitésimale) sous la forme

(S03-1)

Expression de la conservation de la charge

En appliquant la formule (S03-1) au cas du surface fermée, et en élimant ic de la formule obtenue à l'aide de (S03-0b), qui est valable dans ce cas, on obtient l'expression mathématique de la conservation de la charge, à savoir

(S03-2)

C'est l'équation de conservation de la charge, qui exprime que la charge q d'un volume donné de l'espace ne peut varier que si une densité de courant traverse la surface extérieure de ce volume.

Exercice proposé S03-1 (réflexion)

Le lecteur est invité à constater la forte analogie entre la loi (S03-2) et la loi de Gauss (S01-23a) vue dans la guidance de la semaine 1.

Lien avec la notion de courant de la théorie des circuits

Considérons maintenant (figure S03-1) un condensateur parcouru par un courant i. Nous supposons qu'il s'agit d'un condensateur idéalisé, en ce sens que le matériau dont sont constitués les électrodes et les connexions est un conducteur parfait, et que le matériau situé entre les électrodes est un isolant parfait, ainsi que le milieu qui entoure le dispositif.

Figure S03-1 : condensateur idéalisé parcouru par un courant i

Nous avons vu durant les semaines 1 et 2 que la charge d'un condensateur n'est autre que la charge q portée par son électrode "positive" (l'autre électrode portant une charge égale mais de signe opposé). Or, on sait depuis T2 que le courant qui traverse une capacité une capacité idéale est associé à une variation de la charge de celle-ci par l'équation

(S03-3)

(voir la page 1 des Transparents FSAC 1230 Physique - Circuits électriques)

Essayons de déduire une équation analogue à partir des notions "champ" qui précèdent. Pour cela, notons que, puisque le matériau situé entre les électrodes a été suppposé parfaitement isolant, ainsi que l'environnement du dispositif, les charges ne peuvent pas se déplacer dans le matériau situé entre les électrodes, ni d'ailleurs dans le milieu qui entoure le dispositif. La densité de courant est donc nulle partout, sauf dans les électrodes et les connexions.

Appliquons maintenant (S03-2) à une surface fermée entourant l'électrode "positive" (voir figure S03-1), on déduit immédiatement que le courant i est égal à l'intégrale (S03-2) changée de signe (ce qui est normal puisque l'on considére un courant entrant et non sortant. Comme la densité de courant est nulle partout sur la surface d'intégration, sauf à l'endroit où elle est traversée par le conducteur d'amenée du courant, on en déduit que le courant ic dans le conducteur de connexion est donné par la formule (S03-1).

La comparaison avec (S03-2), valable sur la surface fermée S, montre que ce courant vérifie l'équation

(S03-4) ic = dq/dt pour la connexion supérieure

La comparaison des équations (S03-3) et (S03-4) montre que

(S03-4b) ic = i dans le conducteur d'amenée

Cette conclusion est en fait exacte dans tous les conducteurs idéaux.

L'égalité (S03-4b) n'est cependant pas universelle. Pour s'en convaincre, il suffit de considérer une surface d'intégration (non fermée) placée dans l'isolant situé entre les électrodes. Sur cette surface, le courant ic est nul, en vertu de (S11- ) et du fait que la densité de courant est nulle dans les isolants idéaux. Par contre, le courant i doit avoir la même valeur que précédemment puisque, au sens de la théorie des circuits, le courant i ne se termine jamais nulle part.

Pour résoudre ce paradoxe, la fa¸on de faire qui se révèlera la plus fructueuse pour la suite de l'étude est d'admettre que le courant i n'est pas dû uniquement au mouvement des charges, mais comporte aussi un terme supplémentaire que nous écrirons iD. On écrira donc

(S03-4c)
i = ic + iD

où seule la partie ic est reliée à la densité de courant par la formule (S03-1).

Le courant iD est le courant capacitif. On l'appelle habituellement courant de déplacement parce qu'il est associé à une variation du champ de déplacement D. Il faut être attentif au fait que le mot "déplacement" ne fait ici nullement référence à un mouvement des charges : le mouvement des charges est pris en compte complètement par le terme ic.

Dans les conducteurs idéaux, le champ D est nul (voir guidance de la semaine 1), de sorte que la variation de D est nulle et donc aussi le courant iD et que l'on peut écrire

(S03-4d) i = ic dans les conducteurs idéaux

Au contraire, dans les isolants idéaux, le courant ic est nul de sorte que l'on a

(S03-4e) i = iD dans les isolants idéaux.

Ces deux cas se présentent dans le condensateur idéalisé de la figure S03-1 .

Commentaire C03-1 : quel est le correspondant local du courant i de la théorie des circuits ?

Dans une situation stationnaire (champs et densité de courant constants), le courant iD est nul. Les auteurs de livres didactiques se permettent donc souvent de confondre à ce stade le courant ic avec le courant i , ce qui les oblige à revenir sur ces notions lorsqu'ils abordent les phénomènes non stationnaires (cf. semaine 9, équations de Maxwell).

La densité de courant avait déjà été introduite en T2 (voir la page 1 des Transparents FSAC 1230 Physique - Circuits électriques).

Le lecteur peut aussi consulter

pp. 163-164 de A. Guissard et R. Prieels, syllabus fsa1402, janvier 1998 (pp. 151-152 de la version papier).

Exercice proposé S03-2 : à propos de la charge totale d'un condensateur.

Le lecteur est invité à constater la forte analogie entre la loi (S03-4) et l'équation de définition du flux de (S02-2) .

Lorsque la situation est stationnaire (toutes les grandeurs sont indépendantes du temps) ou qu'il n'y a pas d'accumulation de charge dans un domaine considéré, la formule (S03-2) se réduit à

(S03-5)

Exercice proposé S03-3 : rapport entre (S03-5) et la loi des noeuds de Kirchhoff.

On remarquera que les lois (S03-2) et donc (S03-5) sont des lois locales : il suffit qu'elles soient valables sur les volumes élémentaires pour qu'elles soient aussi valables sur des volumes quelconques. Pour montrer cette propriété, on peut utiliser le même argument que pour montrer le caractère local de la loi de Gauss.

Relation entre J et la vitesse des charges

On peut interpréter comme le résultat du déplacement à une vitesse d'une densité de charge r. Considérons pour cela une surface élémentaire DS dans une région de l'espace où une densité de charge r se déplace à une vitesse (cfr. figure S03-2).

Figure S03-2 : Interprétation de la densité de courant

Toute la charge qui passe à travers la surface DS pendant un intervalle de temps Dt se trouvait initialement dans un prisme de base DS et de hauteur v Dt cos q , où q est l'angle entre la vitesse v et la normale à la surface. Le volume DV de ce prisme est

(S03-6) DV = v Dt DS cos q

et la charge qui a traversé DS est donc

(S03-7) Dq = r DV = r v Dt DS cos q

L'intensité du courant dans la direction normale à DS s'obtient en rapportant (S03-7) dans (S03-1). On obtient

(S03-8) J = r v cos q

Cette relation étant valable quelle que soit l'orientation de la surface, on en déduit que

(S03-9)

On a parfois intérêt à considérer plusieurs densités de charge dotées de vitesses différentes. Par exemple, dans le cas où l'on a une densité r+ et une densité r- , dont les vitesses sont respectivement et , on écrira

(S03-10)

Lorsque des charges dotées de vitesses différentes coexistent au même endroit, la formule (S03-9) est parfois utilisée en considérant comme une vitesse moyenne. Il est cependant faux de croire que cela est toujours possible. En effet, si on considère la formule (3.10) dans le cas où la charge totale est nulle (r+ + r- = 0), il est possible d'avoir une densité de courant non nulle, pourvu que et ne soient pas égales. L'expression (S03-9) n'offre pas cette possibilité.

Courant de convection

Puisque la notion de densité de courant est associée à celle de vitesse, elle doit dépendre, comme la vitesse, du choix de l'observateur.

Dans le cas d'un milieu matériel en mouvement, la densité de courant en sera pas forcément la même pour un observateur fixe ou pour un observateur qui se déplace à la même vitesse que la matière.

Si ce dernier observe une densité de charge r' et une densité de courant , un observateur immobile "verra" une densité de courant

(S03-11)

est la vitesse de la matière vue par l'observateur "fixe".

Le second terme de (S03-11) est le courant de convection.

Commentaire S03-2 : limitations de la formule (S03-11).

Exercice proposé S03-4 : calcul d'un courant de convection

Interprétation corpusculaire de la densité de courant

De la même façon qu'une densité de charge r peut s'interpréter comme une densité n de particules portant une charge q par la relation

(S03-12) r = n q

on peut interpréter la densité de courant J comme une densité n de particules de charge q et vitesse v . Il suffit de reporter (S03-12) dans (S03-9) pour obtenir

(S03-13)

Les réserves formulées plus haut concernant (S03-9) peuvent évidemment être répétées à propos de (S03-13).

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Dernière mise à jour le 17-11-2002